Atelier d’écriture
1 – Calembour : jeu de mots fondé sur des ressemblances de sons et des différences de sens
Exemple :
On ne dit pas concierge, mais stupide bougie
On ne dit pas gospel, mais l’enfant a un coup de soleil
On ne dit pas polémiquer, mais Paul et sa souris
On ne dit pas il est népalais, mais c’est un beau bébé
On ne dit pas le portemanteau, mais le cochon a proféré des mensonges à quatre heures du matin
On ne dit pas le corridor, mais mon corps se repose
On ne dit pas pays dangereux, mais paradis
On ne dit pas potager, mais le vieux copain
–
On ne dit pas avoir un blanc, mais commencer tôt l’apéro
On ne dit pas être noir, mais avoir commencé tôt l’apéro
2 – Écrire un texte dans lequel vous répéterez plusieurs fois « ils m’ont dit »
Frédéric Ohlen – Ils m’ont dit – Venir au jour – Nouméa – 2009
Écrivain, poète, éditeur, enseignant, Frédéric Ohlsen est né en 1959 à Nouméa. Il vit ses premières années dans la ferme de son grand-père. Il y apprendra l’amour des mots et du monde. La poésie est au cœur de son itinéraire : l’enfance, la mort, les îles, elle noue avec le monde de l’intime et celui de la Terre, des terres, un lien quasi viscéral. Président de al Maison du livre de la Nouvelle-Calédonie, fondateur des éditions L’Herbier de feu, Frédéric Ohlsen a une très riche bibliographie en plus de la poésie, qui va du roman au récit de vie, en passant par l’anthologie poétique ou l’album jeunesse. La revue Nouveau délits a eu le plaisir de l’accueillir à deux reprises, dans ses numéros 32 et 45. Quintet n’est pas vraiment son premier roman, mais c’est le premier a avoir été publié en métropole, il a été suivi en 2016 par Les mains d’Isis, toujours dans la collection Continents noirs chez Gallimard.
Ils m’ont dit :
« Prends l’arbre, plante-le
Dans la terre noire
À l’ombre de la case.
Prends ta parole aussi
Plante-la sous le soleil
Dans la terre d’ici.
Que ta parole s’enracine
Qu’elle étende au loin ses branches
Qu’elle pousse au loin ses pas. »
Ils m’ont dit :
« La parole n’est pas
vent invisible
fumée légère
frisson de feuilles
mais
l’œil sauvé de la boue
le corps droit sur la pierre
la gorge serrée
le ventre qui gargouille
le frémissement de la joie »
–
Ils m’ont dit d’avoir confiance en moi et de tracer ma voie sans même m’apprendre à me relever.
Ils m’ont dit de ne pas me mettre en colère sans même me respecter.
Ils m’ont dit que je ne serais que mauvaise graine et il m’a fallu trouver à pousser droit.
Ils m’ont dit ceci ou cela et j’ai fini par ne plus les écouter.
Alors désormais, je vis un peu de guingois, certes, mais je ne prends plus au sérieux leurs injonctions et leurs « ils m’ont dit ».
3 – Écrivez un texte commençant par « Quand on est devant la mer »
J.M.G. Le Clézio – L’inconnu sur la terre (essai publié en 1978 – éditions Gallimard)
Jean-Marie Gustave Le Clézio, plus connu sous la signature J.M.G. Le Clézio, né le 13 avril 1940 à Nice, est un écrivain de langue française, comme il se définit lui-même. De nationalité française et britannique, il est fortement imprégné par la culture mauricienne et bretonne de sa famille. Il connait très vite le succès avec son premier roman publié en 1963, Le procès-verbal. Jusqu’au milieu des années 70, son œuvre littéraire porte la marque des recherches formelles du Nouveau Roman. Par la suite, influencé par ses origines familiales, par ses incessants voyages et par son goût marqué pour les cultures amérindiennes, Le Clézio publie des romans qui font une large part à l’onirisme et au mythe (Le désert et Le chercheur d’or), ainsi que des livres à dominantes plus personnelle, autobiographique ou familiale (L’Africain). Il est l’auteur d’une cinquantaine d’ouvrages de fiction (romans, contes, nouvelles) et d’essais. Le Prix Nobel de littérature lui est décerné en 2008 ; en tant qu’« écrivain de nouveaux départs, de l’aventure poétique et de l’extase sensuelle, explorateur d’une humanité au-delà et en dessous de la civilisation régnante ». Son œuvre est traduite en 38 langues.
Résumé
Ce récit fait partie des textes de Le Clézio consacrés à la civilisation amérindienne où il raconte certaines de ses expériences avec les populations de ce pays, en particulier au Mexique où il a longtemps vécu et participé à leur défense. « Je voudrais seulement faire ceci : de la musique avec les mots » nous dit Le Clézio quand il s’envole dans « ce pays où le langage n’existe pas ». Il en ramène d’innombrables trophées : cristaux, racines, feuilles, minéraux, fruits, calices, insectes. Il capture dans ses « mots-boîtes » un peu de vent, de lumière, d’odeurs, de mystère, de tout ce qui l’enchante… Et tout l’enchante : les montagnes, la mer, les déserts, les villes, les jardins, les bus, les routes, les marchés, les enfants, l’aube, les étoiles… Ce livre est la consigne de tous les moments heureux d’une existence éveillée. Celle par exemple de cet « inconnu sur la terre » qui pourrait être un enfant ou un « petit prince » scrutant le monde de son regard immaculé. Le rêve de Le Clézio est ambitieux : créer un langage sans mot, un langage-son ou lumière qui ne ferait qu’éclairer, illuminer, révéler, dans le silence de la beauté. Si l’on accepte toutefois de se laisser emporter dans ce réel-merveilleux, alors le voyage se convertit en une immense ode à la vie et aux éléments.
Extrait
Quand on est devant la mer, tout peut apparaître, disparaître, comme sur une pierre qui n’a pas été sculptée. C’est peut-être pour cela, parce que tout est possible, comme sur une planète étrangère, que les hommes viennent vers elle. C’est peut-être parce qu’il n’y a pas de murs, pas de barrière. Parce que c’est le lieu du danger.
Alors chaque jour, tandis qu’au dehors, dans les couloirs et les abris des villes, dans les cachettes des montagnes, à la source des fleuves, la vie amoncelle les années et trace ses dessins toujours semblables, ici apparaît la nouveauté.
Chaque jour naît ici, puis se détruit puis se refait, au rythme du ressac.
Ils viennent la voir. Ils l’aiment. Ils viennent voir ce qui a été inventé, comme cela, chaque jour, rien qu’avec la mer et le ciel.
–
Quand je suis devant la mer le soir en m’endormant, bien au chaud sous un amoncellement de couvertures, alors que montent les étoiles, alors que se baissent mes paupières, je pense à toi.
Quand je suis devant la mer le matin en me réveillant, toujours au chaud sous mes couvertures, alors que le ciel se poudre de délicates couleurs toutes de luminosité, bousculant les ténèbres encore présentes, je pense à toi.
Toi dans les montagnes, devant une mer de nuages, tu vois aussi ce paysage évoluer en toute beauté, chaque soir et chaque matin, et je sens que tu penses à moi.
Nous avons, pour cela, tous les deux nos appareils photo pour tenter de capter ces éphémères qui nous connectent.
4 – Commencer par « Ce matin, j’ai réussi» et insérer les mots dictés par surprise au fur et à mesure de l’écriture
Ce matin, j’ai réussi à me réveiller sans tomber du lit, sans me tordre le dos ou que sais-je.
Ce matin, j’ai réussi à faire mon café et à le boire sans me brûler alors que je faisais mes gammes au piano.
Ce matin, j’ai réussi à voir ce petit filou d’écureuil qui vole les graines des oiseaux dans le jardin.
Ce matin, j’ai réussi à trouver cette journée suffisamment ensoleillée et doucement venteuse pour sortir en mer avec le voilier.
Ce matin, j’ai réussi à pardonner à mon aimée et suis allé lui offrir un bouquet de tulipes.
Ce matin, j’ai réussi à envier la folle liberté des mouettes et de vouloir moi aussi me libérer.
