Je suis là, las et affalé en chaussettes et en calcif dans mon canapé que mon dernier squatteur a bien voulu enfin libérer, sans compter qu’il a tout de même fallu batailler avec le chat pour l’obtenir de haute lutte, cette place au fond dudit canapé. Mais maintenant que j’y suis, j’y reste. Même s’il sent encore le patchouli rance que c’en est une horreur.

Delong !

Delong, delongdelongDELONG ! que me fait ma cloche.

Sgrogneugneu que je lui réponds à la cloche qui n’arrête pas de delonguer à qui mieux mieux. Et fort en plus. 

J’ouvre, furax, mais calme, mais furax, l’œil bien, bien noir comme il faut et j’avise un bien énervé qui passe en trombe et rentre chez moi, ce bachi-bouzouk !

re-Sgrogneugneu que je continue à faire, me contrefoutant comme de l’an quarante du chat qui fait exactement l’inverse et se carapate dehors. Grand bien lui fasse.

Et de voir, là, le zigue qui parle, s’agite, mouline et me visite au pas de charge tout mon appartement. Mais d’où ? Je me retiens de lui en envoyer une qui ferait valdinguer ses chicots, loin et en vrac surtout. Je me tempère, je me tempère, mais l’attrape par le col façon lapin de garenne qui va y passer au billot, je vous le dis. En-dehors du fait qu’il n’avance plus désormais, les jambes, les bras, les yeux, son moulin à paroles, tout par contre à l’air d’être branché sur le 220 V. Et de me poser la question, c’est comment qu’on le débranche le zozo ? J’ai promis, plus les baffes pleine poire, alors je tiens ma promesse, mais je sens monter chez moi une exaspération qui ne demande qu’à être dégoupillée et à exploser. Ce que je fais.

Je lui hurle dessus.

Un tagueule bien senti.

Avec plein de points d’exclamation et tout, en lettre capitale et en gras.

Trois petits points.

Silence.

Z’êtes qui, vous ?

Le Stress qu’il me balbutie en arrivant à bégayer, ce qui reste quand même une sacrée performance, je dois le dire.

Je dubite l’œil inquisiteur, froid, sourdement calme.

Le Stress donc… Et vous débarquez, comme ça, sans rien dire, à l’improviste alors que j’allais, moi, enfin profiter d’un moment de calme ?

Là, il bugue un coup.

C’est que j’ai un plan à respecter et si je ne le respecte pas, je suis en retard et si je suis en retard, je

Et donc là, c’était mon tour, c’est ça ?

Ben woui.

Et si je vous dis que non, j’ai pas envie, que ça me saoule, et que vous vous en tirez bien avec seulement deux ou trois postillons, mais que la porte, elle est là-bas, et que dehors, c’est mieux pour la santé de tout le monde ?

Ben

Voilà, on est d’accord, vous pouvez décamper, j’ai un canapé à visiter.

Et votre chat ?

Quoi mon chat ?

Vous n’allez pas stresser qu’il se soit carapaté ?

J’éclate de rire. Il ne comprend pas. Je lui explique.

Mon greffier, dès qu’il le peut, il se carapate, mais dès qu’il fait trois pas dehors, il miaule sa race pour pouvoir rentrer de nouveau, tenez, vous ne l’entendez pas miauler, là ? Donc pas de stress, tout va bien dans le meilleur des mondes et vous, vous décarrez de là, vous n’êtes pas le bienvenu. Et il sort, sans moulinade de bras ou que sais-je, passe devant le chat, étonné, et qui, passé son étonnement, se lèche la patte et rentre, zen et queue bien droite.