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Coup de Maëster
Mais n’importe quoi !
Ça m’a fait du bien de me faire bousculer, par cette morveuse, icône féministe des perrons et des paillassons. J’ai encore le sourire con aux babines ; mon chat se débine, je crois qu’il en a marre de mon enchantement idiot, de toute façon, il va profiter du balcon et du gazon de la voisine. Paraît qu’il est trop, trop gentil ce petit minet. Je ne suis pas vraiment très en accord avec son système de notation à la dame, mais bon, la liberté de penser, toussa, toussa. N’empêche, sale bête. Mince, je me rembrunis, alors je repense avec plaisir au bon tour que m’a joué mon Imagination au fond du canapé. Et le sourire sot revient immédiatement. Pas que.
J’en suis là, à me laisser aller à mes extravagances fantasmagoriques, plus de l’ordre du fantasme d’ailleurs, pour être honnête, mais le public étant encore jeune, voire pour certains immatures (patapé ! patrofort ! mais-aïe-euh !), je suis tout dans le contrôle, d’une poigne ferme, promis.
Un carillon folâtre enjoué me tire de ma, de ma, euh ? (bonjour les gens) de mon canapé, je me réajuste en vitesse et ouvre la porte pour me ramasser deux mamelles pleine poire qui ballottent, pas les poires. Imaginez une seule seconde la scène, une bombe anatomique à bonnet phrygien écarlate, seins nus, dessinée par Maëster au coup de crayon redoutable, bras levé brandissant un drapeau, pas Maëster, rhâââ ! que je vois à peine d’ailleurs, coincé que je suis entre ses deux cœurs bien rebondis, en calcif et en chaussettes, toujours.
Et elle s’écrie liberté ! (FRANCE), libertad ! (ESPAGNE), Свобода ! (UKRAINE), Свобода ! (RUSSIE), حرية ! (ARABE), lhibertat ! (AUVERGNE – NDLR : mais diantre, pourquoi ?) et d’autres encore, elle n’arrête pas, un vrai moulin à vent ! Et de l’autre main, un fusil à baïonnette qui éventre mes coussins, et totalement dépoitraillée donc, au-dessus d’une robe jaune qui prend si bien la lumière, pas que la robe, vous avez du mal à suivre dit donc.
Un sauvageon à béret, pistolets dans chaque main se rue dans le salon, franchit le canapé comme s’il s’eut s’agit d’une barricade, tirant en l’air à qui mieux, mieux, le plâtre dégringolant du plafond. Mais c’est y pas possible que ce saligopiot veuille me refaire une mauvaise resucée des Tontons flingueurs, à son âge, dans mon salon, à moi ?! Ingrat ! Les détonations me rendent à moitié dingue et sourd, et mes deux casseurs me retournent ainsi tout l’appartement pour libérer le chat.
PARDON ?!!! que je fais les zyeux en soucoupe.
Mais il prend du bon temps chez la voisine, bande de malotrus à vous deux !
Pis dégagez de chez-moi, nom d’une pipe ! Je vais vous envoyer la facture, vous zallez voir, elle va être salée ! Je finis par réussir à les foutre dehors, non sans mal, ces émeutiers de salon, des plumes volent de partout et la fumée bleuie de la fusillade me pique les naseaux, que j’ai fort fragiles, alors j’éternue, une fois, deux fois, trois fois, et n’y tenant plus, je sors de chez-moi.
Et j’entends ce clac de la porte qui se referme tellement si doucement sur le chambard, moi dehors, en calcif et en chaussettes, les clés restées à l’intérieur, forcément, je n’ai pas eu le temps avec ces deux affreux, enfin un affreux et une pas du tout affreuse. Le chat se radine rigolard, et j’ai du mal avec le grand bien lui fasse, vu que je l’ai mauvaise, obligé que je suis d’aller, à mon tour, voir la voisine. Mon chat se tord de rire sur le paillasson, vraiment une sale bête cette sale bête.
